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par Catherine-Amélie Chassin
Co-directrice du Master Droit des libertés de l’UFR Droit
de l’Université de Caen Normandie
Affaire : CE, Ord., 18 août 2020, 442628
Dans le cadre de la crise sanitaire qui traverse le monde, nombre d’Etats (y inclus la France) ont choisi de lutter contre la pandémie en restreignant l’accès à leurs territoires. Les frontières ont été fermées, les vols aériens réduits.
Dans la présente affaire, le requérant, étudiant français en échange interuniversitaire aux Etats-Unis, a voulu rentrer en France durant l’été 2020. Mais le décret n. 2020-860 du 10 juillet 2020 subordonnait l’embarquement dans les avions en provenance d’Etats tiers à la production du résultat négatif d’un test virologique, test qui devait être pratiqué dans les 72h précédent l’embarquement. Or notre étudiant français arguait qu’au vu des délais d’attente pour ces tests, il ne pourrait pas répondre à cette condition. Il avait donc saisi le juge français d’une procédure d’urgence (dite de référé), en vue de se voir reconnaître le droit de rentrer en France.
Selon le demandeur, le décret empêchait le requérant de revenir en France, alors même que le droit international rappelle très régulièrement le droit de rentrer dans son propre pays – droit qui a même pu être considéré par certains auteurs comme relevant de la coutume internationale (Voir par exemple C. D’ORSI, « La pérégrination du migrant : l’espoir contraint », in Protection des migrants et des réfugiés au XXIe siècle, Académie de droit international, éd. Brill, 2016, pp. 51-125). La conventionnalité du décret était donc en cause, les décrets devant être conformes aux conventions internationales. L’Etat se défendait mollement, rejetant tout intérêt à agir : selon lui, le requérant avait pu rentrer en France et, conformément au décret en cause, y subir à son arrivée le test virologique exigé. Dès lors, l’affaire n’existait en réalité pas puisque l’intéressé était bien rentré en France.
Dans son Ordonnance de référé du 18 août 2020, le juge va donner raison au Gouvernement, constatant le retour du requérant sur le sol français. Mais le Conseil d’Etat va prendre soin d’ajouter un élément essentiel, en précisant que « le droit d’entrer sur le territoire français constitue, pour un ressortissant français, une liberté fondamentale ». Cette qualification n’est pas neutre : elle signifie que le droit d’entrer en France pour un Français, s’il est mis en cause, peut être garanti par le juge de l’urgence, dans le cadre d’un référé-liberté fondé sur l’article L.521-1 du Code de justice administrative. Il permet donc à tout Français de voir ordonner son accès sur le territoire si d’aventure les autorités lui fermaient les portes, et ce dans le cadre d’une procédure accélérée puisque le Code précise que le juge statue en 48h.
La décision ne doit pas tromper : elle ne consacre de droit d’accès sur le sol français que pour les seuls nationaux français, conformément aux obligations internationales. Pour eux, aucune raison ne saurait justifier un refus d’entrée, que ce soit pour des motifs sanitaires ou pour des motifs autres, même s’ils tiennent à la lutte contre le terrorisme. De ce point de vue, il est important de rappeler que les propositions faites de façon récurrente par différents responsables politiques français, et qui aboutirait à pouvoir bannir des Français terroristes, est impossible à mettre en œuvre, tant du fait de la loi française que du fait de la coutume internationale.
La seule solution serait de prévoir la déchéance de nationalité de ces Français indésirables. C’est, on s’en souvient, la proposition qu’avait faite le Président de la République aux lendemains des attentats du Bataclan, lors d’un discours devant l’Assemblée nationale, le 16 novembre 2015. L’annonce avait été suivie d’un projet de réforme constitutionnelle en date du 23 décembre 2015, projet cependant abandonné. Aujourd’hui, la déchéance de nationalité est rendue possible par l’article 25 du Code civil, mais soumise à des conditions strictes parmi lesquelles la plus évidente : la déchéance de nationalité ne saurait aboutir à créer un apatride. Elle ne peut donc s’envisager que pour une personne ayant au moins une autre nationalité.
En revanche, le droit d’accès en France reste limité à une autorisation des autorités françaises pour tout étrange. Ce constat est rappelé très régulièrement par le juge interne, par exemple lorsqu’il rappelle que « la liberté d’aller et venir […] s’exerce, en ce qui concerne le franchissement des frontières, dans les limites découlant de la souveraineté de l’Etat et des accords internationaux et n’ouvre pas aux étrangers un droit général et absolu d’accès sur le territoire français » (CE, Ord., 11 avril 2018, 418027). On retrouve la même position chez le juge international, par exemple lorsque la Cour européenne des droits de l’homme rappelle « le principe bien établi en droit international selon lequel un État n’a aucune obligation générale d’admettre des étrangers sur son territoire » (Cour EDH, GC, déc., 5 mai 2020, M.N. et autres c. Belgique, 2599/18, § 89). Pour l’étranger donc, le principe reste bien celui d’une autorisation d’entrée. Celle-ci peut être préalablement donnée de façon collective, par exemple avec l’acceptation de principe de la libre entrée des citoyens européens (art. 21 § 1er du Traité de fonctionnement de l’Union européenne) ; dans les autres cas, elle sera donnée individuellement lors du passage de la frontière (art. L. 213-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile).
En revanche, rappelle le Conseil d’Etat, les Français ont bien un droit d’accès au territoire français. Ce principe n’est cependant pas absolu dans la mesure où s’ils ont bien un droit d’accès, en revanche ce droit ne semble pas nécessairement être assorti d’une obligation positive de la part de l’Etat d’aller les chercher là où ils se trouvent. Ainsi dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, les forces internationales et syriennes ont permis de faire reculer l’emprise territoriale de Daesh ; d’anciens combattants mais aussi leurs familles se sont ainsi trouvés internés dans des camps. Des compagnes de « soldats » de Daesh et leurs enfants, de nationalité française, sont depuis lors retenus dans des camps de Syrie ; certains ont demandé à être rapatriés. Par quatre Ordonnances rendues le 22 avril 2019 (CE, Ord., 23 avril 2019, 429668, 429669, 429674 et 429701), le Conseil d’Etat leur oppose la même réponse : le rapatriement induirait des négociations avec la Syrie et, partant, relève de la conduite des relations internationales. Dès lors, le juge n’est pas compétent pour ordonner leur rapatriement aux autorités françaises.
L’Ordonnance du 18 août 2020 est donc essentielle pour rendre effective cette liberté fondamentale qu’est l’accès au territoire français ; mais elle ne saurait aboutir à interférer avec la conduite des relations internationales – ce que d’ailleurs rappelle de nouveau le Conseil d’Etat s’agissant des « enfants de Daesh » en septembre 2020 (CE, Ord., 9 septembre 2020, 439520).
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