24/04/2025
Pour contribuer à la communication des projets menés par l’Institut, nous sommes à la recherche d’un·e chargé·e de communication en alternance. Sous la responsabilité du chargé de communication de l’Institut int
L’Institut international des droits de l’Homme et de la paix et l’Université de Caen Normandie s’associent pour une série de « Points de vue » exclusifs.
par Charlotte GIRARD
Etudiante en Master 2 Droit des libertés
à l’Université de Caen Normandie
Affaire : CJUE, 22 novembre 2022, C-69/21
Le principe de non refoulement, garanti en droit européen et international, suppose qu’un Etat ne peut adopter une mesure d’éloignement à l’encontre d’un ressortissant d’un pays tiers, même en situation irrégulière, dès lors qu’il existe un risque réel que celui-ci soit exposé à de mauvais traitements dans l’Etat de destination. Il convient de préciser que l’interdiction des traitements inhumains et dégradants, protégée de manière équivalente par l’article 3 de la CEDH et l’article 4 de la CDFUE, dès lors que ceux-ci atteignent le seuil de gravité requis, revêt un caractère absolu en raison de son rattachement au principe de dignité humaine.
Parfois trop restrictive en se montrant davantage prétexte à répression qu’à protection, parfois trop englobante en empiétant sur le droit international, la protection offerte aux étrangers contre les éloignements en droit de l’UE manquait de clarté. Si la directive 2008/155/CE (dite « retour ») a tenté d’harmoniser ce droit, des questions restées en suspens ont amené la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) à se prononcer.
A l’instar de la Cour européenne des droits de l’Homme (Cour EDH), la CJUE tend vers une protection de plus en plus inclusive du principe de non refoulement en ajoutant la notion de douleur dans l’analyse du risque de traitement inhumain ou dégradant. Du fait de leurs décisions communes, elles renforcent la protection des droits fondamentaux et offrent une sécurité juridique aux ressortissants étrangers.
Le litige concerne un ressortissant russe, atteint d’une forme rare de cancer du sang et soigné aux Pays-Bas. Le traitement prescrit, interdit en Russie, consiste notamment en l’administration de cannabis thérapeutique. Suite à plusieurs demandes d’asile rejetées, le requérant a quitté le champ du droit des réfugiés pour entrer dans celui du droit des étrangers et a saisi le tribunal de la Haye aux fins d’obtention d’un titre de séjour ou de report de la mesure d’éloignement au motif que, en cas d’interruption du traitement, « la douleur serait à ce point importante qu’il ne pourrait plus dormir ni se nourrir, ce qui aurait des conséquences importantes non seulement sur son état physique, mais aussi sur son état psychique, le rendant dépressif et suicidaire » (point 21). La « situation d’urgence médicale », au sens de la loi néerlandaise, n’étant pas avérée, le recours a abouti à un renvoi préjudiciel devant la CJUE dans le but de savoir si la mesure de retour était conforme au droit de l’UE.
En premier lieu, après avoir rappelé l’obligation positive des Etats de respecter le principe de non refoulement, la CJUE se réfère à la jurisprudence de la Cour EDH qui a appliqué, « par ricochet », l’article 3 de la CEDH aux demandeurs d’asile faisant l’objet d’une mesure d’éloignement en établissant que la responsabilité de l’Etat est engagée dès lors qu’une procédure d’extradition expose le ressortissant étranger à des risques de mauvais traitements dans le pays de destination (Cour EDH, 7 juillet 1989, Soering c. Royaume-Uni, req. n° 14038/88) et affirmé que cet article s’oppose à une telle mesure prise à l’encontre d’un étranger malade dès lors que celui-ci s’expose à « risque réel d’être exposé à un déclin grave, rapide et irréversible de son état de santé entraînant des souffrances intenses » (Cour EDH, 13 décembre 2016, Paposhvili c. Belgique, req. n° 41738/10). En adoptant cette approche, la CJUE juge que le droit de l’UE s’oppose à une décision de retour prise à l’encontre d’un étranger malade en séjour irrégulier « lorsqu’il existe des motifs sérieux et avérés de croire que le retour de ce ressortissant exposerait ce dernier, en raison de l’indisponibilité de soins appropriés dans le pays de destination, à un risque réel de réduction significative de son espérance de vie ou de détérioration rapide, significative et irrémédiable de son état de santé, entraînant des douleurs intenses » (point 66).
En deuxième lieu, la CJUE réfute l’introduction d’un délai strict durant lequel l’augmentation de la douleur devrait s’effectuer pour que la mesure d’éloignement soit contestée (point 76).
En troisième lieu, un Etat ne peut organiser le retour d’un ressortissant étranger en ne s’inquiétant des conséquences sur sa santé qu’au moment du voyage sans prendre en compte celles au sein de l’Etat de destination (point 82).
En dernier lieu, si la délivrance d’un titre de séjour est de la compétence exclusive des Etats membres, la Cour juge que la mise en œuvre d’une mesure d’éloignement doit respecter les droits fondamentaux, en particulier le droit au respect de la vie privée. Les traitements médicaux ajoutés aux éléments de la vie privée, les autorités nationales ne peuvent prendre une telle mesure sans évaluer l’état de santé du ressortissant. Toutefois, la CJUE pose une limite en disant que, pour que l’Etat membre soit privé de prendre une mesure d’éloignement, il ne suffit pas d’établir que le ressortissant étranger soit affecté par un changement de traitement en cas de retour. Il est nécessaire que le risque de mauvais traitements atteigne le seuil de gravité requis.
Si la résolution du litige appartient désormais aux juridictions internes, la décision rendue par la CJUE lie les Pays-Bas mais également les autres Etats membres.
Contrairement à la Cour EDH qui a depuis longtemps une position ferme en la matière, la CJUE n’a pas toujours été protectrice envers les étrangers malades en situation irrégulière. Elle avait d’abord jugé que l’absence de traitement médical adéquat dans le pays de destination n’est pas cause de rejet d’une mesure d’éloignement, même si cela n’entraine pas une éligibilité à la protection subsidiaire (CJUE, 18 décembre 2014, M’Bodj c. Belgique, C-542/13). Elle avait ainsi réduit le champ de protection des étrangers malades en interprétant de manière stricte la notion de traitement inhumain et dégradant.
Ici, la CJUE instaure un dialogue des juges en suivant les traces de la Cour de Strasbourg qui a permis une avancée considérable dans la protection des étrangers malades, notamment en abaissant le seuil de gravité requis pour lequel le retour d’un étranger constitue un mauvais traitement. Si la seule douleur est désormais prise en compte par la Cour EDH dans l’analyse d’un éventuel traitement inhumain et dégradant, et non plus nécessairement des circonstances exceptionnelles, la CJUE apparait audacieuse dans le but de permettre à l’article 4 de la CDFUE d’offrir une plus large protection que celle offerte par l’article 3 de la CEDH. En effet, la Cour de Luxembourg a étendu ce raisonnement en n’exigeant du demandeur d’asile débouté qu’une « détérioration rapide, significative et irrémédiable », contre « un déclin grave, rapide et irréversible de son état de santé entraînant des souffrances intenses » (op. cit.) dans les arrêts de la Cour EDH.
Ce mouvement jurisprudentiel tend à instaurer des standards de protection pour les ressortissants d’Etats tiers malades risquant de ce fait d’être exposés à de mauvais traitements. Le principe de non refoulement bénéficie alors d’une vision extensive dans la jurisprudence luxembourgeoise. Néanmoins, la CJUE aurait pu aller encore plus loin en instaurant une obligation de report des mesures d’éloignement pour les ressortissants d’Etats tiers malades, voire une obligation de droit au séjour pour raisons de santé.
Actualité
24/04/2025
Pour contribuer à la communication des projets menés par l’Institut, nous sommes à la recherche d’un·e chargé·e de communication en alternance. Sous la responsabilité du chargé de communication de l’Institut int
Retour sur
07/04/2025
Du 25 février au 25 mars, 15 rencontres départementales ont eu lieu sur l’ensemble du territoire normand dans le cadre du projet Ecoality.
Coup de coeur
28/03/2025
L’équipe de l’Institut international des droits de l’Homme et de la paix a sélectionné des contenus à regarder, lire et écouter.
Retour sur
27/03/2025
Mercredi 26 mars s’est tenue la 14e édition du Concours lycéen de plaidoiries pour les droits de l’Homme de Toamasina à Madagascar.
Actualité
24/03/2025
Le 18 mars 2025, l’Université de Caen Normandie, la Région Normandie et l’Institut international des droits de l’Homme et de la paix, ont annoncé le lancement de la Chaire Normandie pour la Paix, intitulée « Mémoire et
Actualité
20/03/2025
Le Prix Liberté vise à mettre en lumière des combats menés pour défendre des libertés dans le monde. Les jeunes, grâce à leur vote, ont le pouvoir de désigner le ou la lauréate du Prix Liberté 2025 qui se verra récompen
Actualité
07/03/2025
Ce vendredi 7 mars marque le lancement d’une initiative innovante, multilatérale et importante dans la promotion des femmes en tant que forces de paix, dans la prévention des crises et des conflits et les négociations de paix
Actualité
07/03/2025
L’Institut international des droits de l’Homme et de la paix, l’association YES-TaFiTa et la Coopération décentralisée des Régions Normandie et Atsinanana organisent le 14e Concours lycéen de plaidoiries pour les droits
Actualité
05/03/2025
Les 23 et 30 avril 2025, l’Institut accueille la Consultation sur les droits de l’enfant dans ses locaux d’Hérouville-Saint-Clair. Une vingtaine de jeunes pourront échanger autour de la thématique du droit des
Coup de coeur
28/02/2025
L’équipe de l’Institut international des droits de l’Homme et de la paix a sélectionné des contenus à regarder, lire et écouter.
Point de vue
25/02/2025
L’Institut international des droits de l’Homme et de la paix et l’Université de Caen Normandie s’associent pour une série de « Points de vue » exclusifs.
Actualité
25/02/2025
Le programme pédagogique Ecoality est un projet européen visant à sensibiliser les jeunes normands à l’intersectionnalité des genres et aux changements climatiques. Structuré en trois grandes étapes, ce programme perme
Actualité
21/02/2025
Du 10 au 14 février 2025, le jury international s’est réuni au Dôme et à l’Université de Caen Normandie pour étudier les 601 propositions candidates au Prix Liberté et retenir trois personnes et organisations engagé
Point de vue
12/02/2025
Dans le cadre de la semaine de jury international du Prix Liberté, Fiona Schnell, directrice générale de l’Institut, a donné un cours de droit international aux 23 jeunes réunis. Une prise de parole neutre et ouverte ayant p
Actualité
12/02/2025
Du 10 au 14 février 2025, 23 jeunes âgés de 15 à 25 ans et venus du monde entier sont réunis à Caen pour étudier collectivement l’ensemble des propositions de personnes ou d’organisations, menant un combat en faveur de l
Actualité
07/02/2025
A l’occasion de leur dernier rassemblement, les 18 et 19 janvier derniers, les jeunes du Conseil Régional des Jeunes ont pu découvrir une session de sensibilisation au programme Ecoality
Retour sur
06/02/2025
L’Institut international des droits de l’Homme et de la paix s’est associé à la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (LICRA) et le Centre LGBTI de Normandie sur la demande de la Protection Judici
Actualité
05/02/2025
Parmi les temps forts du Prix Liberté 2025, le jury international de jeunes âgés de 15 à 25 ans se réunira à Caen, en Normandie, du 10 au 14 février.
Coup de coeur
27/12/2024
L’équipe de l’Institut international des droits de l’Homme et de la paix a sélectionné des contenus à regarder, lire et écouter.
Point de vue
23/12/2024
L’Institut international des droits de l’Homme et de la paix et l’Université de Caen Normandie s’associent pour une série de « Points de vue » exclusifs.
Actualité
18/12/2024
Le concours lycéen de plaidoiries pour les droits de l’Homme est un projet pédagogique qui permet à des jeunes de mettre en lumière et de dénoncer des cas précis de violations des droits de l’Homme à travers le monde.
Retour sur
18/12/2024
Du 12 au 14 décembre 2024, Bejaia, en Kabylie, a accueilli la seconde édition du Concours international de plaidoirie, un événement organisé et présidé par le Bâtonnier de l’Ordre régional des avocats de Bejaia, Dr
Actualité
16/12/2024
L’Institut international des droits de l’Homme et de la paix forme les professionnels aux droits de l’Homme et aux Objectifs de développement durable pour créer des multiplicateurs, capables à leur tour de sensibiliser et
Point de vue
13/12/2024
L’Institut international des droits de l’Homme et de la paix et l’Université de Caen Normandie s’associent pour une série de « Points de vue » exclusifs.
Point de vue
11/12/2024
L’Institut international des droits de l’Homme et de la paix et l’Université de Caen Normandie s’associent pour une série de « Points de vue » exclusifs. Affaire : Cons. cont., n° 2024-1114 QPC du 29 nov. 2024, Sulliv
Point de vue
04/12/2024
L’Institut international des droits de l’Homme et de la paix et l’Université de Caen Normandie s’associent pour une série de « Points de vue » exclusifs. Affaire : Cour de cassation, Chambre criminelle, 26 novembre 202
Point de vue
03/12/2024
L’Institut international des droits de l’Homme et de la paix et l’Université de Caen Normandie s’associent pour une série de « Points de vue » exclusifs. Affaire : Conseil constitutionnel, n° 2024-1113 QPC du 22 novemb
Coup de coeur
02/12/2024
L’équipe de l’Institut international des droits de l’Homme et de la paix a sélectionné pour vous des contenus à regarder, lire et écouter.
Point de vue
02/12/2024
L’Institut international des droits de l’Homme et de la paix et l’Université de Caen Normandie s’associent pour une série de « Points de vue » exclusifs. Affaire : Conseil d’État, 8 novembre 2024, 487687, publié aux
Retour sur
27/11/2024
Mercredi 20 novembre, l’UFR Sciences et Techniques de l’Université de Rouen, à Saint-Etienne-du-Rouvray, accueillait les septièmes Assises de l’éducation. L’Institut y était invité pour présenter certains de ses proj
Point de vue
22/11/2024
L’Institut international des droits de l’Homme et de la paix et l’Université de Caen Normandie s’associent pour une série de « Points de vue » exclusifs.
Retour sur
21/11/2024
L’Institut international des droits de l’Homme et de la paix co-anime depuis 2022 le Conseil Régional des Jeunes de Normandie aux côtés de la Région Normandie. Dans le cadre d’un weekend de rassemblement à Carolles, ses
Point de vue
21/11/2024
L’Institut international des droits de l’Homme et de la paix et l’Université de Caen Normandie s’associent pour une série de « Points de vue » exclusifs.
Point de vue
20/11/2024
L’Institut international des droits de l’Homme et de la paix et l’Université de Caen Normandie s’associent pour une série de « Points de vue » exclusifs.
Actualité
20/11/2024
Chaque année, le Défenseur des droits organise son événement de présentation et de valorisation du rapport annuel du Défenseur des droits consacré aux droits de l’enfant basé sur la consultation des enfants. Cette année
Actualité
19/11/2024
La 7ème édition du Prix Liberté est lancée, et l’Institut international des droits de l’Homme et de la paix propose aux enseignants inscrits au programme pédagogique, trois niveaux distincts d’accompagnement pour mettre
Actualité
24/03/2025
On March 18, 2025, the University of Caen Normandy, the Normandy Region and the International Institute for Human Rights and Peace announced the launch of the Normandy for Peace Chair, entitled “Memory and Future of Peace: law, h