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L’Institut international des droits de l’Homme et de la paix et l’Université de Caen Normandie s’associent pour une série de « Points de vue » exclusifs.
par Lucile Piraube
Etudiante en Master 2 Droit des libertés
à l’Université de Caen Normandie
Affaire : Cass. Soc., 19 octobre 2022, 21-12.370
Tout agent public, en raison de son incarnation de la puissance publique, est soumis à une obligation de réserve et de retenue dans l’expression de ses opinions personnelles. Ce régime dérogatoire est une conséquence du principe de neutralité religieuse des services publics, consacré par la Loi de séparation des Églises et de l’État du 9 décembre 1905. Cette neutralité est absolue puisque l’agent sert d’intermédiaire entre les usagers et l’État, il se doit donc lui-même d’être neutre et doit agir dans l’intérêt du service public.
Il est à rappeler que le principe de neutralité des agents publics est d’origine jurisprudentielle. À titre d’exemple, dans un arrêt de 1950, le Conseil d’État (CE) a retenu qu’un « devoir de stricte neutralité devait s’imposer à tout agent collaborant à un service public » (CE, 3 mai 1950, Dlle JAMET n°98.284, Rec. p. 247). La jurisprudence du Conseil d’État est extensive en la matière, il rappelle ainsi de manière constante que les obligations inhérentes à l’exécution d’un service public sont les mêmes lorsque le service public est confié à une personne privée (voir CE, sect., 31 janvier 1964, CAF de l’arrondissement de Lyon, n°59.115 : Lebon, p. 76). Ainsi, dès lors qu’un individu participe à un service public, quel que soit son statut, il est soumis aux mêmes obligations.
Au moment des faits de l’arrêt, l’obligation de laïcité et de neutralité des agents publics est posée à l’article 25 de la Loi du 13 juillet 1983 (Loi n° 83-634). Depuis, elle a été transférée par l’Ordonnance du 24 novembre 2021 (Ord, n° 2021-1574) à l’article L121-2 du Code général de la fonction publique.
Cette affaire est relative à l’application des principes de laïcité et de neutralité au salarié d’une association gérant un service public, en dehors de l’exercice de ses fonctions.
En l’espèce, un homme est engagé par une association en tant que conseiller en insertion sociale et professionnelle. Mis à disposition d’une commune, il participe au dispositif « seconde chance », visant à accompagner les jeunes en difficulté dans un parcours d’insertion professionnelle. En 2015, le salarié, se voyant reprocher d’avoir publié sur son compte Facebook, accessible à tous, des propos politiques et religieux incompatibles avec l’exercice de ses missions, est licencié pour faute grave. La mission locale a estimé que ces propos constituaient une atteinte à l’obligation de neutralité du salarié dont découle un devoir de réserve et respect de la laïcité.
La Cour d’appel d’Aix-en-Provence, dans son arrêt du 18 décembre 2020, donne raison au salarié et annule le licenciement. Elle retient tout d’abord que le salarié a été discriminé en raison de l’expression de ses opinions politiques et convictions religieuses. Puis, elle considère qu’un conseiller d’insertion, mis à disposition d’une commune, conserve sa liberté d’engagement politique et d’expression publique en dehors de son temps de travail.
Le 19 octobre 2022, l’arrêt des juges du fond est cassé et annulé par la Cour de cassation, les juges auraient dû vérifier si le salarié était identifiable sur Facebook en sa qualité de conseiller d’insertion affecté à la commune, et si les propos virulents publiés n’étaient pas susceptibles de constituer un manquement à l’obligation de réserve du salarié en tant qu’agent du service public. Pour prendre sa décision, la Chambre sociale confirme d’abord que les principes de neutralité et de laïcité, résultant de l’article 1 de la Constitution, s’appliquent à l’ensemble des services publics, même s’ils sont gérés par des personnes privées. Le salarié de droit privé peut donc être soumis aux principes de laïcité et de neutralité, ainsi qu’au devoir de réserve lorsqu’il participe à un service public ou, qu’il est mis à disposition d’une personne publique, même en dehors de son temps de travail. Elle précise ensuite que les missions locales pour l’insertion professionnelle et sociale des jeunes, sous forme d’association, sont des personnes de droit privé gérant un service public. En conséquence, elle décide, sur le fondement de l’article L1133-1 du Code du travail, que le licenciement du salarié de droit privé, employé pour une mission de service public, n’est pas nul lorsque la différence de traitement correspond à une exigence professionnelle et déterminante, tel qu’un manquement à l’obligation de neutralité.
L’arrêt rendu par la Cour de cassation est essentiel, il vient préciser l’application des principes de neutralité et de laïcité aux salariés mis à disposition d’une personne publique ou, employés par des personnes morales de droit privé gérant un service public.
La Haute juridiction confirme la solution de son arrêt CPAM de Seine-Saint-Denis (Cass. Soc., 19 mars 2013, CPAM de Seine-Saint-Denis, 12-11.690), les principes de laïcité et de neutralité du service public, posés à l’article 1 de la Constitution, s’appliquent aux salariés d’organismes privés chargés d’un service public. Dans la présente affaire, elle précise, en outre, que cette règle s’applique lorsqu’il est employé par une mission locale pour l’insertion professionnelle et sociale des jeunes et mis à disposition d’une collectivité territoriale.
Puis, la Cour donne une nouvelle dimension au principe de laïcité : les faits reprochés au salarié sont commis lors de la publication de propos sur son compte Facebook, accessible à tous. L’émergence des réseaux sociaux constitue un réel enjeu pour la Cour. Pour ne pas prendre une décision allant à l’encontre de la liberté d’expression laissée aux agents du service public, elle tient compte de la publicité et du caractère virulent des propos, ainsi que de la possible identification du salarié en tant que conseiller d’insertion. Pourtant, on pourrait se demander si la solution aurait été différente en cas de publication sur un groupe privé. Pour les salariés de droit privé, la Cour considère que si les propos sont accessibles à un groupe restreint alors ils relèvent du cadre privé et le salarié ne peut pas se voir reprocher les propos publiés (voir Cass. Soc. 12 septembre 2018, 16-11.690) ; cependant, si les propos sont accessibles à tous et nuisent à l’employeur alors il pourra être sanctionné. De telles précisions ne sont pas apportées aux agents du service public. Toutefois, la Cour réaffirme dans l’arrêt commenté qu’un salarié de droit privé, chargé d’une mission de service public, doit respecter le devoir de réserve imposé aux agents publics, même en dehors de son temps de travail. Ainsi, tous les agents du service public ont la faculté de s’exprimer librement sur les réseaux sociaux, à condition de respecter l’obligation de réserve.
Cette décision était prévisible puisqu’elle intervient suite à la Loi du 24 août 2021, précisant que l’obligation de neutralité et de laïcité s’applique aux services publics et à leurs agents, même lorsqu’il s’agit de salariés de droit privé. Néanmoins, la décision est motivée sur l’article 1 de la Constitution, la portée de cette Loi devra être vérifiée lorsque des faits commis après son entrée en vigueur seront à juger. Quoi qu’il en soit, la Cour montre ici une nouvelle fois l’importance du respect des principes de laïcité et de neutralité des agents du service public, même s’ils sont des salariés de droit privé, en fixant une nouvelle limite à leur liberté d’expression sur les réseaux sociaux.
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