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par Gwennaëlle CHESNAIS
Etudiante en Master 2 Droit des libertés
à l’Université de Caen Normandie
Si le droit de manifester a en France une valeur constitutionnelle (C. Constit. n° 2019-780 DC du 4 avril 2019), fondée sur l’article 11 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, son exercice est cependant encadré.
Cet encadrement se fait, entre autres, par la présence sur les lieux de manifestations des « forces de l’ordre », principalement composées de gendarmes mobiles et de policiers, dont le devoir est de veiller au bon déroulement de celles-ci et de garantir le respect de l’ordre public.
Dans ce cadre, les forces de l’ordre sont souvent accusées de violences policières, notamment en raison du recours aux armes de force intermédiaire, jugé parfois excessif comme cela a été le cas lors des manifestations des « gilets jaunes » en 2018 ou plus récemment à Sainte-Soline en mars 2023.
En effet, l’art. R211-13 du Code de la sécurité intérieure (CSI), autorise les autorités à faire usage de la force si les circonstances le rendent absolument nécessaire et proportionné au maintien de l’ordre public ; elle doit prendre fin lorsque ce trouble a cessé. Les blessures causées à cette occasion bénéficient soit de la légitime défense (art. 122-5 du CP), soit du fait justificatif d’autorisation de la loi (art.122-4 du CP) prévu par ce même code, qui permet le recours à la force pour dissiper un attroupement après deux vaines sommations de se disperser faites par l’autorité publique portant un insigne, voire sans sommation si des violences ou voies de fait sont exercées contre les forces de l’ordre ou si ces dernières ne peuvent défendre le terrain autrement (art. L211-9 du CSI).
Cependant les armes utilisées peuvent entraîner des blessures voire la mort et, bien que légal, leur usage fait débat.
Lors d’une manifestation en mai 2016, quatre policiers suivis par une foule hostile ont été contraints de se retrancher dans la cour d’un immeuble et d’appeler des renforts.
Un brigadier-chef a lancé au ras du sol une grenade GMD pour disperser la foule et extraire les quatre fonctionnaires, blessant grièvement un homme à la tête. Suite à quoi une enquête a été diligentée et une information ouverte.
L’homme blessé s’est constitué partie civile. Le brigadier-chef a quant à lui été placé sous le statut de témoin assisté, puis, par une ordonnance du juge d’instruction du 30 septembre 2020, a bénéficié d’un non-lieu, confirmé par la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 8 février 2022.
Un pourvoi a été formé par la partie civile. En premier lieu, il invoque qu’il ressortait du dossier un flou certain quant au degré d’hostilité opposé par les manifestants visés, que la victime n’était qu’un observateur passif et que le brigadier-chef avait employé la grenade sans sommation ni aucune progressivité. Ainsi, pour le demandeur, la chambre d’instruction a violé les articles 3 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH), 122-4 du CP, 184 et 593 du code de procédure pénale (CPP), R.211-13 et R.434-18 du CSI. En second lieu, le demandeur rappelle l’obligation pesant sur l’État de mener une enquête effective, fondée sur l’art. 3 de la CEDH, afin d’établir les circonstances exactes et les responsabilités de chacun. Le juge devait ainsi, pour apprécier la nécessité et proportionnalité du recours à la force, procéder à un examen méticuleux de la situation. Le demandeur reproche à la cour d’appel d’avoir justifié le non-lieu par des motifs fondés sur une imprécision quant au nombre d’individus présents, leur hostilité vis-à-vis des forces de police, ainsi qu’une contradiction certaine avec les conclusions du Défenseur des droits et l’exploitation des vidéos en procédure, violant donc les articles précités ainsi que l’art. 591 du CPP.
La Cour de cassation approuve la cour d’appel d’avoir retenu l’irresponsabilité pénale du brigadier-chef (art.122-4 du CP). Elle souligne tout d’abord que les sommations ne sont pas requises par l’art. L.211-9, alinéa 6 du CSI en cas de violences ou de voies de fait contre les forces de l’ordre appelées en vue de dissiper un attroupement ou dans l’impossibilité de défendre autrement le terrain qu’elles occupent, ce qui était le cas en l’espèce. Ensuite elle estime que l’examen par la cour d’appel des constatations, sans se limiter aux déclarations des fonctionnaires de police, était méticuleux et répondait à l’exigence d’une enquête effective. Ainsi, la chambre d’instruction a justifié le caractère absolument nécessaire et proportionné de l’usage de la force par les policiers au regard des articles L.211-9 et R.211-13 du CSI. Le pourvoi est donc rejeté.
Dans cet arrêt, la Cour de cassation est amenée à examiner les violences policières au regard des aspects substantiel et procédural de l’article 3 de la CEDH. S’agissant du premier, l’article 3 dispose que nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradant, ce que le demandeur estime avoir subi.
L’aspect procédural quant à lui, oblige l’État à mener une enquête effective en cas d’agression physique par des agents publics, comme cela a été rappelé par la Cour européenne des droits de l’homme (Cour EDH, 18 févr. 2021, P.M et F.F. c. France, n°60324/15).
Toutefois, en cas d’une telle agression, la responsabilité pénale peut ne pas être retenue si les faits relèvent de la légitime défense (art.122-5 du CP) et d’une autorisation de la loi (art.122-4 du CP), telle celle de faire usage de la force en cas d’absolue nécessité et de proportionnalité, dans les cas prévus par les articles L211-9 et L435-1 du CSI.
En l’espèce, la Cour de cassation approuve les juges du fond d’avoir retenu cette irresponsabilité. Toutefois, le § 10 de l’arrêt mérite d’être souligné :« et alors que celui-ci (le brigadier-chef), en l’état des connaissances de son administration, ne pouvait anticiper que ce type de grenade était susceptible de provoquer de telles lésions, seuls des effets traumatiques mineurs étant alors documentés. ». Ce passage suggère que la solution aurait peut-être été différente si le danger réel de blessures graves lié à l’utilisation de la grenade avait été connu au moment des faits.
Suite au rejet de son pourvoi le demandeur pourrait saisir la CEDH qui aurait peut-être une appréciation différente des conditions de nécessité et de proportionnalité de l’usage de la force.
Le dernier rapport de l’Inspection Générale de la Police Nationale montre une hausse des cas de saisine dus à l’usage de la force à l’occasion d’une interpellation ou d’une opération assimilée, puisqu’il est passé de 37 % en 2021 à 54 % en 2022.
Le Conseil de l’Europe dans un rapport d’octobre 2023 s’est aussi alarmé du nombre élevé de blessés et de morts lors des manifestations en France et a appelé à réformer les inspections générales de la police et de la gendarmerie. Pourtant, une proposition de loi (Ass. nationale, proposition de loi n°557) vise à introduire une présomption de légitime défense au profit des forces de l’ordre en cas d’utilisation de leur arme pour se défendre ou défendre autrui contre une atteinte injustifiée. Serait-elle conventionnelle ?
Enfin, en l’espèce il était question de la responsabilité d’un agent de l’État. Or il est possible que la responsabilité de l’État du fait de ses agents soit aussi engagée. Cela a été le cas dans l’affaire Rémi Fraisse où, bien que l’irresponsabilité pénale au sens de l’art 122-4 ait été retenue (Cass. crim., 23 mars 2021, n°20.82-416), la cour administrative d’appel (CAA) de Toulouse a retenu la responsabilité sans faute de l’État et accordé des dommages et intérêts aux proches de la victime en raison du préjudice moral subi (CAA 21 février 2023).
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