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L’Institut international des droits de l’Homme et de la paix et l’Université de Caen Normandie s’associent pour une série de « Points de vue » exclusifs.
par Nathanaël TINARD
Etudiant en Master 2 Droit des libertés
à l’Université de Caen Normandie
Affaires : Conseil d’État, 18 Novembre 2022, OFPRA, 459513
Un ressortissant turque d’origine kurde rentre en France en Juin 2019 afin d’y demander l’asile, risquant selon lui des persécutions au regard de son appartenance au Parti Démocratique des Peuples (HDP). Sa demande d’asile devant l’Office de Protection des Réfugiés et des Apatrides, est rejetée le 4 Novembre 2020 au motif que ses déclarations ne permettaient pas de prouver son engagement politique effectif.
Le requérant porte donc le contentieux devant la Cour Nationale du Droit d’Asile. Celle ci annule la décision de l’Office de Protection des Réfugiés et des Apatrides le 15 Octobre 2021 et renvoie à l’examen de la demande de l’intéressé alors même que le Conseil d’État a le pouvoir de casser sans renvoi et de statuer sur le fond s’il en va de l’intérêt d’une bonne administration de la justice. L’intérêt de cet arrêt porte sur l’obligation d’adaptation des modalités d’examen du demandeur d’asile vulnérable devant l’OFPRA.
L’Office de Protection des Réfugiés et des Apatrides se pourvoit le 15 Décembre 2021 devant le Conseil d’État afin que celui ci annule la décision de la Cour Nationale du Droit d’Asile et qu’il renvoie l’affaire devant cette dernière juridiction.
Le Conseil d’État rend sa décision le 18 novembre 2022.
Alors même que le requérant s’abstient de soulever le moyen de la privation de l’examen individuel de la demande, la CNDA va le relever d’office.
En effet, celui ci souffrait d’un grave problème d’élocution, assimilable à une vulnérabilité et donc à un handicap (selon le guide des procédures de l’OFPRA), l’Office de Protection des Réfugiés et des Apatrides aurait du mettre en place un aménagement des conditions d’examen de la demande d’asile (article L531-10 Ceseda). En droit des réfugiés, la vulnérabilité se définit par des champs de protection spécifique listés de façon non exhaustif, ce qui nuirait à la force de la notion selon Elodie Boublil et Laure Wolmark (« Vulnérabilité, soin et accueil des demandeurs d’asile » dans la Revue des Droits de l’Homme, 2018). La Cour considère notamment cet élément d’une telle importance qu’elle soulève d’office ce moyen, lui conférant ainsi ipso facto le caractère de moyen d’ordre public.
Consécutivement à ce constat, la Cour affirme que le requérant a été dans l’impossibilité de se faire comprendre du fait de la privation de modalités d’examen appropriées à la situation du demandeur d’asile.
L’OFPRA s’oppose à la CNDA et considère qu’elle a commis deux erreurs de droit. Tout d’abord, l’OFPRA argue que la CNDA soulève d’office un moyen qui n’est pas d’ordre public. La privation d’un examen individuel de la demande n’est effectivement pas un moyen d’ordre public selon la jurisprudence actuelle du Conseil d’État et donc la CNDA ne peut que commettre une erreur de droit en le soulevant d’office.
Ensuite, la Cour Nationale du Droit d’Asile commet sa deuxième erreur de droit en considérant que l’absence d’adaptation du déroulement de l’entretien pour tenir compte des troubles du langage du demandeur d’asile conduisait à un défaut d’entretien (conclusions du Rapporteur public). Or les textes (Directive 2013/32/UE du Parlement Européen et du Conseil du 26 Juin 2013, article L531-10 Ceseda et article L531-18 Ceseda obligent l’Office de Protection des Réfugiés et des Apatrides à tenir compte de la situation de handicap du demandeur d’asile. Toutefois ils ne l’obligent qu’afin que ce dernier se fasse comprendre et n’imposent nullement une adaptation d’entretien à chaque constatation de vulnérabilité.
La Cour Nationale du Droit d’Asile aurait du donc rechercher si le défaut d’adaptation du déroulement de l’entretien aurait mené l’intéressé à l’impossibilité de se faire comprendre.
Le Conseil d’État dans son arrêt en cassation du 22 novembre 2022 tranche en faveur de l’Office de Protection des Réfugiés et des Apatrides et considère que la Cour Nationale du Droit d’Asile a effectivement commis deux erreurs de droit dans sa décision du 15 octobre 2021. L’Office de Protection des Réfugiés et des Apatrides est ainsi fondé à demander l’annulation de la décision de la Cour Nationale du Droit d’Asile.
Cet arrêt du Conseil d’État vient préciser dans quelle mesure la Cour Nationale du Droit d’Asile peut annuler une décision de l’Office de Protection des Réfugiés et des Apatrides lorsque le demandeur d’asile vulnérable n’a pas bénéficier d’adaptation de l’entretien pour le recueil de son récit. Cet arrêt vient aussi éclairer l’interprétation divergente entre le Conseil d’État et la Cour Nationale du Droit d’Asile de ce qui doit constituer un moyen d’ordre public.
Le président Raymond Odent définissait le moyen d’ordre public comme « un moyen relatif à une question d’importance telle que le juge méconnaîtrait lui même la règle de droit qu’il a mission de faire respecter si la décision juridictionnelle rendue n’en tenait pas compte.» (« Contentieux administratif » (réédition, 1978))
La CNDA en relevant d’office un moyen le revêt de la qualification de moyen d’ordre public et semble ainsi vouloir forger de l’importance à la défaillance qu’elle a détectée dans l’affaire d’espèce. En effet, l’absence d’adaptation à l’oral pour un demandeur d’asile souffrant de grave trouble d’élocution prive le requérant d’une appréciation fine de son récit par l’officier de protection.
Il est surprenant que le Conseil d’État refuse ce caractère d’ordre public à ce moyen qui conduirait ainsi à une meilleure appréciation des conditions de déroulement de l’entretien. En effet, selon l’introduction de la Convention relative aux droits des personnes handicapés « le handicap résulte de l’interaction entre des personnes présentant des incapacités et les barrières comportementales. » Un rapport du Défenseur des droits de 2019 déplorera d’ailleurs le manque d’implication de la France dans le respect des engagements découlant de cette Convention. Il apparaît d’une importance telle de prendre en compte la situation de chaque requérant car sinon « l’examen individuel » (article L532-3 Ceseda) du requérant ne serait pas effectif.
En outre, la CNDA posait une présomption audacieuse en assimilant le manquement d’adaptation au handicap du demandeur d’asile à l’absence d’entretien. Le Rapporteur public, M. Malverti arguait que faire des vices affectant l’entretien personnel des moyens d’ordre public « risquerait d’alourdir le travail de la cour. » Or tout au contraire, une constatation objective de la défaillance d’adaptation conduisant ipso facto à un défaut d’entretien faciliterait le travail de la CNDA. De plus, cela renforcerait l’obligation envers l’OFPRA pour qu’enfin ce soit la société qui s’adapte au handicap et non l’inverse.
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