30/07/2025
Une quinzaine d’étudiants internationaux s’est réuni à Caen du 30 juin au 4 juillet pour participer à la 23e édition de l’Université de la paix sur le thème « Paix durable à l’épreuve de l’économie ».
L’Institut international des droits de l’Homme et de la paix et l’Université de Caen Normandie s’associent pour une série de « Points de vue » exclusifs.
par Hugo LECOQ
Etudiant en Master Droit des libertés de l’UFR Droit
de l’Université de Caen Normandie
Affaire : CE, 17 octobre 2022, ADDE, 443289
La différence de traitement intervenant dans le cadre de l’aide juridictionnelle, fondée sur la cause d’extinction de l’instance amène-t-elle une rupture d’égalité entre les avocats, telle est la question posée dans l’arrêt « ADDE » du Conseil d’État (ci-après CE) du 17 octobre 2022.
L’aide juridictionnelle est un mécanisme mis en place par la loi du 10 juillet 1991 qui permet la prise en charge, par l’État, des frais liés à une procédure juridictionnelle ou à une procédure non-juridictionnelle. Cette aide est destinée aux personnes voulant faire valoir leurs droits devant une juridiction, mais qui ne possèdent pas les moyens financiers nécessaires à la mise en œuvre d’une telle procédure.
Cette aide répond à un barème déterminé par l’état en fonction du contentieux. Parmi les frais prit en charge on trouve notamment la rémunération des avocats. Dans un arrêt du 3 novembre 2016 (n°378190), le CE indique que l’aide juridictionnelle n’a pas vocation à couvrir tous les frais engagés par les avocats, laissant à ceux-ci une partie des coûts liés à la mise en œuvre de l’aide juridictionnelle. À travers cet arrêt, il apparaît que l’aide juridictionnelle n’a pas pour vocation d’indemniser la totalité des frais avancés par les avocats mais d’assurer une rémunération minimale de ce dernier. Cette rétribution accorde une juste compensation pour l’avocat intervenant dans le cadre de ce mécanisme. Il est à noter qu’il est loisible à ces derniers de refuser la rétribution qui leur est proposé dans le cadre de l’aide juridictionnelle.
Pour mieux appréhender la question amenée par l’arrêt du 17 octobre 2022, il est important de comprendre que la différence de traitement est une discrimination, mais qu’elle est légitime en ce qu’elle est prévue par la loi, n’est pas disproportionnée et est justifiée. C’est une entorse au principe d’égalité.
Dans cet arrêt, l’association Avocats pour la défense des droits des étrangers introduit devant le CE une demande d’annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite de rejet, née du silence gardé du garde des Sceaux, quant à la demande d’abrogation du dernier alinéa de l’article 111 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991.
Le moyen principalement avancé par les requérants est que la disposition litigieuse amène une rupture d’égalité entre les avocats de l’aide juridictionnelle. L’article 111, devenu l’article 93 du décret du 28 décembre 2020, créerait une différence de traitement pour les avocats apportant leur concours aux bénéficiaires de l’aide juridictionnelle, et ce, en fonction de la cause d’extinction de l’instance. Ainsi, l’avocat pourra seulement bénéficier « d’une rétribution n’excédant pas la moitié de celle fixée par le barème applicable en aide totale sans autre imputation à ce titre » (§2) si l’extinction de l’instance est due à un non-lieu. À contrario, si l’instance est éteinte par une autre cause qu’un non-lieu à statuer, l’avocat pourra prétendre à la rétribution qui lui est due, sans se voir appliquer une rétribution minorée à 50 % de celle fixée par le barème.
En l’espèce, le CE reconnaît l’existence d’une différence de traitement, mais il estime qu’elle n’est manifestement pas disproportionnée. De ce fait, il considère qu’il n’y a pas de rupture d’égalité entre les avocats intervenant dans le cadre de l’aide juridictionnelle. La haute juridiction reprend d’ailleurs l’attendu de principe de l’arrêt CE Mme Duvignères du 18 décembre 2002 (n°233618) au considérant 4. Cet attendu était déjà posé, d’une manière moins explicite dans l’arrêt CE Denoyez et Chorques de 1974 (n°88032). De ce fait, le CE marque la possibilité pour le législateur de traiter de manière différente des avocats intervenant dans le cadre de l’aide juridictionnelle, en justifiant cela par la différence de situation entre les diverses affaires concernées.
De plus, le CE souligne l’existence de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 qui met en place un mécanisme permettant à l’avocat de renoncer à percevoir la part contributive de l’État et de poursuivre la partie tenue aux dépens du versement de ce qui lui est dû au titre de la rétribution. Le CE, entre l’absence de rupture d’égalité et l’existence du mécanisme de l’article 37 considère que la différence de traitement issue de l’article 93 n’est pas disproportionnée.
Le CE considère également que les dispositions contestées sont sans incidence sur le droit des justiciables à bénéficier de l’aide juridictionnelle ce qui permet d’écarter les articles 6 paragraphe 1 de la Convention Européenne des droits de l’homme ainsi que l’article 14 du pacte international des droits civils et politiques. En application de l’arrêt d’Assemblé Roujansky du 23 novembre 1984, le CE écarte l’application de l’article 10 de la déclaration universelle des droits de l’homme (Ci-après DUDH). La DUDH n’est pas applicable, car c’est une résolution de l’assemblée générale des Nations Unies et non un traité. Or selon la jurisprudence CE Gisti et Fapil de 2012 (n°322326), seuls les traités internationaux ratifiés dans le cadre de l’article 55 peuvent être appliqués en droit interne.
Le CE innove statuant sur la possible rupture d’égalité entre les avocats intervenant dans le cadre de l’aide juridictionnelle. Néanmoins, déjà dans un avis du 18 janvier 2017 (n°399893), le CE avait statué sur la mise en œuvre des articles 93 et 37, (anciennement article 111 du décret du 19 décembre 1991), démontrant la complexité de cette différence de traitement. Il considère dans cet avis qu’il faudrait faire une mise en œuvre complémentaire des deux articles.
Les Cours administratives d’appel (ci-après CAA) se sont d’ailleurs prononcées à de multiples reprises sur l’application des articles 93 et 37 (par exemple, CAA Nantes, 2 octobre 2020, N°20NT00103). Une jurisprudence constante de la juridiction administrative s’observe quant à la possibilité de traiter différemment ces avocats. La requête du 17 octobre 2022 est une source potentielle de danger pour la jurisprudence existante, car si le CE considérait qu’il y avait effectivement une rupture d’égalité alors la jurisprudence existante aurait été vouée à disparaître, au même titre que la disposition litigieuse. Par conséquent, le CE considère qu’il n’y avait pas de rupture d’égalité afin de préserver l’article 93 et la jurisprudence liée à ce dernier.
Par ailleurs, une contradiction semble se dessiner entre cette décision du CE d’octobre 2022 et l’avis du CE du 18 janvier 2017 (n°399893). En effet, dans son arrêt, la cour semble prétendre que l’article 37 est une alternative à l’application de l’article 93 et que ce dernier est le seul motif justifiant la différence de traitement qui n’est pas manifestement disproportionnée. Même si la justification du CE est légère pour considérer l’absence de rupture d’égalité, il faut s’interroger sur la portée de cet arrêt. Il vient contredire l’avis de 2017 et toute la jurisprudence qui en découle, notamment celle des CAA qui ont de manière constante appliqué l’avis du 18 janvier 2017 (n°16MA01254, n°20NT02854,n°20NT00103). L’approche de l’avis de 2017 et des CAA semble plus pertinente en ce qu’elle donne une véritable complémentarité aux textes régissant la rémunération des avocats intervenant dans le cadre de l’aide juridictionnelle. La question est donc de savoir si cet arrêt est un revirement de jurisprudence par rapport à l’avis du CE du 18 janvier 2017 ou si le CE s’est simplement appuyé sur l’article 37 pour éviter à la jurisprudence antérieure de disparaître en cas de reconnaissance d’une rupture d’égalité entre les avocats de l’aide juridictionnelle.
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