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L’Institut international des droits de l’Homme et de la paix et l’Université de Caen Normandie s’associent pour une série de « Points de vue » exclusifs.
par Syal BOUGARD LEGRIX
Etudiant en Master Droit des libertés de l’UFR Droit
de l’Université de Caen Normandie
Affaire : Cass. Crim. 6 octobre 2021, 21-84.188
La Convention EDH pose dans son article 6 § 3 que tout accusé a droit notamment « à être informé dans le plus court délai, dans une langue qu’il comprend et d’une manière détaillée, de la nature et de la cause de l’accusation portée contre lui. ». Le III de l’article préliminaire du code de procédure pénale prévoit que la personne poursuivie ou suspectée a le droit d’être assistée d’un interprète si elle ne parle pas la langue française, afin d’être informée des charges qui pèsent contre elle. L’article D. 594-16 du même code pose le régime juridique s’appliquant au choix de l’interprète quelle que soit l’étape de la procédure. L’article 102 du code de procédure pénale reprend ce régime juridique dans le cadre plus spécifique de l’audition de témoins. Cet article impose que l’interprète soit choisi sur des listes dressées par la Cour de cassation ou par chaque cour d’appel ; si ce n’est pas le cas il se doit de prêter serment « d’apporter son concours à la justice en son honneur et sa conscience ». Ces deux exigences sont posées afin de garantir sa compétence, son indépendance et son impartialité. Les deux articles précités disposent que l’interprète ne peut être choisi notamment parmi les personnes entendues comme témoins au cours de la procédure.
Le problème de droit ici est de savoir si il est possible, au cours du débat contradictoire devant le juge des libertés et de la détention (ci après JLD) à fin de placement en détention provisoire, de faire appel à un interprète ayant assisté le mis en cause durant sa garde à vue et qui fut ensuite entendu comme témoin.
Mr. X, étranger ne comprenant pas le français, est suspecté de viol et d’agression sexuelle aggravée. Il est placé en garde à vue puis mis en examen, et il fait l’objet d’un débat contradictoire devant le JLD, qui le place en détention provisoire. L’interprète qui l’accompagne est celui qui est déjà intervenu durant la garde à vue, mais il a aussi été entendu comme témoin. Mr. X conteste pour ce motif le placement en détention provisoire en interjetant appel devant la chambre de l’instruction. Celle-ci rend un arrêt le 1er juillet 2021 qui confirme l’ordonnance du JLD. Elle estime que l’interprète s’est borné à donner son avis sur la compréhension du français du mis en cause, et que ce faisant son impartialité ne peut être remise en cause. Mr. X forme un pourvoi en cassation visant à faire annuler l’arrêt rendu par la chambre de l’instruction.
Le moyen présenté à la chambre criminelle rappelle que l’interprète choisi pour assister le mis en cause est tenu d’une obligation d’impartialité et ne peut donc être entendu comme témoin. Il souligne le fait que l’interprète avait dit lors de son audition que Mr. X faisait semblant de ne pas comprendre les échanges et évitait les questions relatives aux infractions dont il était accusé. Le pourvoi considère donc que l’interprète est un témoin à charge, et que le fait de le conserver comme interprète lors de l’audience devant le JLD constitue une violation de l’impartialité des interprètes et des droits de la défense. Il conclut en considérant que le refus d’annuler le placement en détention, malgré la présence de l’interprète entendu comme témoin à charge préalablement dans la procédure, constitue une violation des articles préliminaires III, 102, 121, 171, 802, D. 594-16 du code de procédure pénale et des articles 5 et 6 de la Conv.EDH.
La Cour de Cassation rappelle que toute personne poursuivie ou suspectée a droit à l’assistance d’un interprète, et que celui-ci ne peut être choisi parmi les témoins de l’affaire. Elle juge ensuite, en s’appuyant sur l’article D.594-16 du code de procédure pénale, que lorsque l’interprète choisi lors de la première audition de garde à vue est ensuite entendu comme témoin, il ne peut plus rester l’interprète du mis en cause, et ce quelles que soient les raisons ayant conduit l’interprète à être entendu comme témoin. La Cour de Cassation estime que la chambre de l’instruction a violée les articles préliminaires, III, 803-5 et D. 594-16 du code de procédure pénale.
La cassation a une portée importante pour le mis en examen : il est remis en liberté immédiatement contre l’avis du JLD et de la chambre de l’instruction. Mais la Cour de cassation s’appuie sur l’article 803-7 du code de procédure pénale pour le placer elle-même sous contrôle judiciaire car elle estime que les conditions fixées à l’article 144 du code de procédure pénale justifiant cette mesure sont réunies. Elle trouve un compromis en protégeant un principe qu’elle juge ici important, à savoir l’impartialité de l’interprète, tout en ne compromettant pas la procédure en cours en laissant totalement libre de toutes contraintes le mis en examen.
L’intégration du droit à l’assistance d’un interprète à toutes les étapes de la procédure résulte d’une loi du 5 Août 2013 qui transpose une directive du 20 octobre 2010. Auparavant ce droit existait mais n’était pas aussi clairement intégré au code de procédure pénale. Le décret n°2016-214 du 24 février 2016 précise le régime de désignation de l’interprète, régime calqué sur celui existant concernant les interprètes intervenant à d’autres stades de la procédure.
La Cour de Cassation fait de la violation du régime posé par le décret une nullité substantielle. De fait, ni l’article 102 ni l’article D.594-16 ne prévoient la nullité en cas de violation. Même si la Cour de Cassation avait déjà considérée dans un arrêt du 8 juin 2006 (n° 06-81.359) que le défaut d’impartialité d’un expert peut constituer une cause de nullité, cette solution est dégagée pour la première fois en ce qui concerne un interprète intervenant lors du débat contradictoire devant le JLD car l’article 102 ne s’applique qu’à l’audition devant le juge d’instruction.
La chambre criminelle en fait également une nullité d’ordre public. C’est un type de nullité spécifique qui ne nécessite pas la preuve d’un grief pour être prononcée. On peut noter que la Cour de Cassation ne reprend aucun des arguments qu’on lui présente : elle se borne à constater que la règle prévue aux articles 102 et D.594-16 du code de procédure pénale a été enfreinte, aucun grief particulier n’est retenu.
Comme souvent dans sa jurisprudence – par exemple cet arrêt du 14 octobre 2003 – la Cour de Cassation s’appuie sur la notion de « bonne administration de la justice », qualifiée d’objectif à valeur constitutionnelle depuis la décision du conseil constitutionnel du 3 décembre 2009, pour justifier de la nullité même en l’absence de grief. Lorsqu’une règle nécessaire à la bonne administration de la justice est en cause, sa violation entraîne nécessairement une nullité sans avoir à démontrer de grief, ce qui est bien le cas ici afin de protéger la bonne administration de la justice. Cette solution est à rapprocher de l’arrêt du 25 juillet 1979 (Bull. crim. 1979, n° 253) de la chambre criminelle qui juge que l’absence de prestation de serment d’un expert peut entraîner la nullité de son expertise sans avoir à établir de grief et n’entre donc pas dans le champ de l’article 802 du code de procédure pénale.
La Cour de Cassation fait une application stricte de l’article D594-16 qui vise à assurer l’effectivité du droit à un interprète – droit qu’elle rappelle, mais aussi à garantir l’impartialité totale de l’interprète, qui pourrait être compromise si il intervient dans la procédure en tant que témoin. Il pourrait être suspecté d’influencer les interlocuteurs du mis en cause ou le mis en cause lui même en tronquant ses propos.
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