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Articles 431-3 et 431-4 du Code pénal
Article 593 du Code de procédure pénale
Article 10 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme
La liberté d’expression constitue le point nodal d’une société démocratique (CEDH 7 déc. 1976 Handyside c. Royaume-Uni §49). Elle est garantie conventionnellement par l’article 10§1 de la Convention européenne des droits de l’Homme (ci-après Convention EDH) et constitutionnellement par l’article 11 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen ; et peut être définie comme le fait de manifester ouvertement ses opinions.
Néanmoins, cette liberté n’est pas absolue. En effet, son exercice peut être restreint ou sanctionné par la loi si cela constitue une mesure nécessaire dans une société démocratique, afin de protéger les droits d’autrui et assurer la défense de l’ordre et la prévention du crime (CEDH (GC) 15 mai 2023 Sanchez c. France, §144).
En droit interne, le juge est amené, depuis la décision « Jacques Vabre » de 1975, à contrôler la conventionnalité des lois, notamment au regard de la Convention EDH, pouvant aller jusqu’à écarter l’application d’une norme interne si elle contrevient aux exigences du texte. Ainsi, une condamnation prononcée sur le fondement d’une norme contraire aux textes supranationaux pourra se révéler inconventionnelle.
Afin d’exercer ce contrôle, le juge doit vérifier si l’acte reproché au prévenu s’inscrit dans un débat d’intérêt général, défini comme tout élément pouvant éveiller et attirer l’attention du public, dès lors que l’on ne sombre pas dans le voyeurisme (CEDH (GC) 27 juin 2017 Satakunnan c. Finlande, §171). Ensuite, il doit contrôler la proportionnalité entre le but poursuivi par la sanction et l’ingérence dans la liberté d’expression.
Au surplus, l’obligation de motivation (art. 485 du Code de procédure pénale, ci-après CPP) des décisions est une des garanties du droit au procès équitable posé par l’article 6 de la Convention EDH, exigeant que “les demandes et les observations des parties [soient] vraiment entendues, c’est-à-dire dûment examinées par le tribunal saisi” (CEDH, Hôpital Local Saint-Pierre d’Oléron et autres c. France §83). Cette obligation se matérialise notamment par la nécessité, pour les juges, d’examiner et de répondre aux moyens péremptoires déposés dans les conclusions, à savoir ceux pouvant influer sur la solution du litige (Crim. 22 janv. 1963). La motivation des jugements tend à être un obstacle à l’arbitraire et à l’incompréhension des décisions par les justiciables et l’article 593 CPP sanctionne de nullité les décisions rendus en cas d’absence ou d’insuffisance des motifs.
L’arrêt de la Cour de cassation (ci-après la Cour) en date du 11 septembre 2024 illustre le strict contrôle de la motivation des juges du fond par la Chambre criminelle dans le cadre d’un contrôle de conventionnalité d’une condamnation pénale.
En l’espèce, une information judiciaire fut ouverte concernant des infractions liées à des actions d’opposition à l’installation d’un site d’expérimentation de déchets radioactifs. Une ordonnance de renvoi en jugement devant le tribunal correctionnel pour attroupement fut rendue et la Cour d’appel condamna trois prévenus à quatre mois d’emprisonnement avec sursis pour participation sans arme à un attroupement après sommation de se disperser.
Les prévenus ont formé un pourvoi en cassation. A l’appui de leur prétention, ils arguent qu’ils avaient demandé dans leurs conclusions aux juges du fond de rechercher si “l’incrimination d’un comportement constitutif d’une infraction pénale [pourrait], dans certaines circonstances, constituer une ingérence disproportionnée dans l’exercice de la liberté d’expression, compte tenu de la nature et du contexte de l’agissement en cause” (§ 7.). Les demandeurs reprochent à la Cour d’appel de ne pas avoir répondu à ce moyen péremptoire, de ce fait elle aurait violé l’article 10 de la Convention EDH et l’article 593 du CPP.
Au visa des deux articles précités, la Cour de cassation casse l’arrêt de condamnation en reprochant aux juges du fond de ne pas avoir recherché, comme il le leur était demandé, si l’incrimination d’attroupement ne constituait pas en l’espèce une atteinte disproportionnée à la liberté d’expression des prévenus (§ 12.).
L’arrêt commenté s’inscrit dans la lignée stricte du contrôle de conventionnalité des condamnations pénales sur le fondement de l’article 10 de la Convention EDH. En effet, la Cour a déjà plusieurs fois approuvé les juges du fond d’avoir écarté la responsabilité pénale de prévenus en se fondant sur le fait que leur condamnation porterait une atteinte disproportionnée à l’exercice de la liberté d’expression. La Haute juridiction cite notamment une décision de non-lieu en matière d’escroquerie (Crim. 26 oct. 2016) et une décision relative au délit d’exhibition sexuelle (Crim 26 fév. 2020). Dans le même sens, un arrêt du 6 septembre 2023 censure une Cour d’appel n’ayant pas examiné le moyen fondé sur la liberté d’expression concernant la violation de domicile et l’infraction à la législation sur les armes. Ce strict contrôle de conventionnalité a également été mis en œuvre dans l’affaire de vol de portrait d’Emmanuel Macron dans des hôtels de ville afin d’alerter le public sur l’urgence climatique.
Ainsi, l’arrêt du 11 septembre 2024 s’inscrit dans cette exigence constante, appliquée ici au délit d’attroupement, qui pourrait ainsi être justifié par l’exercice de la liberté d’expression.
Néanmoins, la cassation est seulement fondée sur une insuffisance de motifs. Il est fait une application classique de l’obligation de motivation. En effet, les juges sont tenus de motiver la sanction pénale sur des considérations propres à chaque espèce, tenant notamment au contexte et à la nature des circonstances. Autrement dit, ils ne peuvent se fonder sur des considérations d’ordre général ou émanant d’une norme ou d’une jurisprudence antérieure.
Ainsi, l’exigence de motivation n’est pas remplie dès lors que la juridiction ne fait qu’énoncer de manière abstraite que l’incrimination d’un comportement ne peut constituer une atteinte à la liberté d’expression sans examiner, d’une part, si les circonstances permettent de faire entrer cet agissement dans un débat d’intérêt général, et d’autre part la proportionnalité entre l’agissement en cause et la sanction.
En l’espèce, la Cour d’appel de renvoi devra contrôler le moyen soulevé par les prévenus afin de déterminer s’il y avait un débat d’intérêt général. La réponse pourrait être positive à la lumière de la décision précitée relative aux vols de portrait du chef de l’Etat par des militants écologistes. In fine, la Cour d’appel devra examiner si la sanction s’avère disproportionnée au regard de la liberté d’expression. Le régime applicable à la liberté d’expression, à savoir sa protection ou sa restriction, dépend dès lors des circonstances d’espèce, les juges devant effectuer une analyse casuistique des faits et motiver leurs décisions de condamnations afin que celle-ci ne soit pas inconventionnelle. Dans l’affaire Bouton contre France, la Cour européenne des droits de l’Homme a considéré qu’une condamnation à un emprisonnement avec sursis pour exhibition sexuelle violait l’article 10 de la Convention EDH. En l’espèce, les prévenus ont également été condamnés, pour le délit d’attroupement, à une peine d’emprisonnement avec sursis. Si la Cour d’appel de renvoi maintient cette condamnation, tout en motivant suffisamment le rejet du moyen tenant à l’inconventionnalité de la décision, estimant la sanction proportionnée, les condamnés pourront saisir la Cour EDH qui appréciera si la France a, du fait de cette condamnation, violé ou non, la liberté d’expression garantie par l’article 10 de la Convention EDH.
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