30/07/2025
Une quinzaine d’étudiants internationaux s’est réuni à Caen du 30 juin au 4 juillet pour participer à la 23e édition de l’Université de la paix sur le thème « Paix durable à l’épreuve de l’économie ».
par Eline Gerard
Etudiante en Master Droit des libertés de l’UFR Droit
de l’Université de Caen Normandie
Affaire : Cons. Const., décision 2020-866 QPC du 19 novembre 2020, Société Getzner France
Dans le cadre de la lutte contre la pandémie de Covid-19, la loi n°2020-290 du 23 mars 2020, entrée en vigueur immédiatement, a instauré en France un état d’urgence sanitaire pour deux mois. Cette loi habilitait notamment le gouvernement à prendre par ordonnances les mesures nécessaires afin de limiter la propagation du virus, conformément à l’article 38 de la Constitution de 1958. À cette fin, l’article 8 de l’ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020 prévoit la possibilité que les procédures non pénales dans lesquelles les parties sont représentées par un avocat puissent se dérouler sans audience à la demande d’une partie ou sur décision du juge. Un délai de 15 jours est laissé aux parties pour s’opposer à la procédure sans audience, mais il ne s’applique pas aux procédures en référé, entre autres.
La question prioritaire de constitutionnalité (ci-après « QPC ») adressée au Conseil Constitutionnel en l’espèce, provient d’un litige de concurrence déloyale et de parasitisme entre plusieurs sociétés. Le juge des référés du tribunal de commerce de Saint-Nazaire, par ordonnance du 6 mai 2020, fait droit aux requêtes de la société Gerb comprenant : une demande d’assignation en référé d’heure à heure de trois sociétés dont la société Getzner France ainsi qu’une demande de recours à la nouvelle procédure sans audience. Posée par l’avocat de la société Getzner, la Cour de Cassation a transmis, dans son arrêt du 24 septembre 2020 (19-40.056), la question suivante au Conseil Constitutionnel : « L’article 8, alinéa 1, de l’ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020 est-il conforme à la Constitution au regard du préambule de la Constitution, et particulièrement de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, de l’article 55 de la Constitution éclairé par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme ? ».
La société requérante invoque que les dispositions contestées permettent « au juge […] d’imposer aux parties une procédure sans audience » (consid. 3), méconnaissant ainsi le droit à un procès équitable consacré par l’article 16 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen (ci-après « DDHC ») et par l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales (ci-après « CEDH »). Le syndicat des avocats de France et le syndicat de la magistrature voient ces dispositions comme contraires aux droits de la défense et au droit à un recours juridictionnel effectif puisque les procédures d’urgence visées peuvent aboutir à des décisions au fond. L’ordre des avocats au barreau de Paris ajoute que ces mesures sont disproportionnées par rapport à l’objectif de lutte contre l’épidémie de Covid-19 et qu’elles constituent une rupture d’égalité entre les parties due à l’impossibilité pour l’adversaire de s’opposer à cette décision. Enfin, l’ordre des avocats présente au Conseil un « principe de présence » à reconnaître qui garantirait la présence physique du justiciable devant le juge.
Le Conseil Constitutionnel ne reconnaît pas ce principe dans sa décision 2020-866 QPC du 19 novembre 2020 et conclut à la conformité de l’article 8 de l’ordonnance n°2020-304 à la Constitution. En effet, concernant l’atteinte alléguée aux droits de la défense et au droit à un procès équitable, le Conseil précise que ces dispositions répondent à l’objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé et au principe constitutionnel de continuité du fonctionnement de la justice. De plus, les dispositions contestées ne s’appliquant que pour une durée limitée (un mois après la fin de l’état d’urgence sanitaire), qu’à des instances où les parties sont représentées par des avocats et qu’il ne s’agit que d’une possibilité pour le juge, les droits de la défense, le droit à un procès équitable et l’égalité des parties restent garantis. Le Conseil refuse en outre de vérifier la conformité d’une disposition législative aux accords internationaux de la France, en l’espèce l’article 6 CEDH en application de sa jurisprudence constante (décision n°74-54 DC du 15 janvier 1975).
Tout d’abord, cette décision du Conseil est importante puisqu’il accepte de vérifier des dispositions issues d’une ordonnance de l’article 38 de la Constitution non ratifiée, à condition que : le délai d’habilitation soit terminé et que les dispositions relèvent matériellement du domaine de la loi (consid. 9-11). En l’espèce, l’article 8 contesté établit des « règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques » (consid. 10) relevant dès lors du domaine législatif. Ce revirement de jurisprudence amorcé par la décision n°2020-843 QPC du 28 mai 2020 n’a pourtant rien d’évident : jusqu’alors les ordonnances de l’article 38 non ratifiées étaient considérées comme caduques. Les considérer dorénavant comme des dispositions législatives est un grand pas qui n’a pas été suivi dans un premier temps par le Conseil d’État (ci-après « CE ») (CE, 1er juillet 2020, Conseil national de l’ordre des architectes, 429132). Si la décision n°2020-851/852 QPC du 3 juillet 2020 a fini par convaincre le CE (CE, 28 septembre 2020, 441059, consid. 6), le Conseil Constitutionnel a sans doute vu dans la décision analysée l’opportunité d’assoir encore cette nouvelle jurisprudence.
Ce dernier semble aller au bout du raisonnement en laissant la porte ouverte à un contrôle a priori de ces dispositions législatives (consid. 8). Dans le cas où une loi nouvelle modifierait des dispositions issues d’une ordonnance non ratifiée, ce nouveau texte législatif pourrait être examiné par le Conseil en vertu de sa jurisprudence ancienne (décision n°85-187 DC du 25 janvier 1985). Cette évolution est d’autant plus souhaitable dans le contexte sanitaire actuel, où le gouvernement n’hésite pas à procéder largement par ordonnances, sans nécessairement prendre le temps de les faire ratifier.
De plus, si la décision du Conseil semble logique au vu de la nécessaire célérité des procédures dites d’urgence ainsi que de la continuité du fonctionnement de la justice (consid. 17), des interrogations sur la proportionnalité des mesures subsistent.
Suite à l’apparition des procédures sans audience dans le droit commun par la loi n°2019-222 du 23 mars 2019, l’ajout du principe de publicité et d’oralité des débats au bloc de constitutionnalité dans la décision n°2019-778 DC du 21 mars 2019 (consid. 102) était venu renforcer le droit à un procès équitable, protégé par l’article 16 DDHC (décision n°2006-540 DC du 27 juillet 2006). Constatant que « l’organisation d’une audience devant ces juridictions est une garantie légale des exigences constitutionnelles des droits de la défense et du droit à un procès équitable » (consid. 14), le Conseil fait pourtant prévaloir le contexte sanitaire particulier. Il considère les garanties légales suffisantes : l’application limitée dans le temps de ces dispositions, le caractère urgent des procédures concernées et le maintien de la procédure contradictoire écrite avec la représentation par avocat. Au contraire, Bruno LASSERRE, vice-président du CE, estime l’oralité comme « la condition de la justesse, de la pertinence et de la praticabilité des décisions rendues par le juge » (B. LASSERRE, Rapport public du CE, 16 avril 2020, p.12). Les garanties semblent, de ce point de vue, bien faibles au regard de la place primordiale de l’oralité des débats en procédure civile permettant également aux parties de s’approprier le procès.
Enfin, l’absence d’un droit d’opposition des parties, l’absence de motivation de la décision et l’absence d’un recours dans les procédures d’urgence permettent de douter qu’il ne s’agit pas d’« un pouvoir discrétionnaire » (consid. 21) du juge. Il faut souligner qu’au civil « le procès doit avant tout rester la chose des parties » (E. BROCHIER et M. BROCHIER, « Attention à la suppression des audiences », Recueil Dalloz, 2020, p.1119). La décision du Conseil est d’autant plus indulgente que suite au nouvel état d’urgence sanitaire (décret n°2020-1257 du 14 octobre 2020 et loi n°2020-1379), l’article 6 de l’ordonnance n°2020-1400 du 18 novembre 2020 admet un délai d’opposition dans les procédures d’urgence et la possibilité pour une partie de demander la tenue d’une audience. Le gouvernement a finalement réduit le champ des procédures sans audience. Le Conseil Constitutionnel a-t-il été trop souple dans son contrôle ?
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