30/07/2025
Une quinzaine d’étudiants internationaux s’est réuni à Caen du 30 juin au 4 juillet pour participer à la 23e édition de l’Université de la paix sur le thème « Paix durable à l’épreuve de l’économie ».
L’Institut international des droits de l’Homme et de la paix et l’Université de Caen Normandie s’associent pour une série de « Points de vue » exclusifs.
par Charles Hartmann
Etudiant en Master 2 Droit des libertés
à l’Université de Caen Normandie
L’un des principes les plus représentatifs de l’idée selon laquelle la procédure a pour fonction d’effacer les biais humains, est le droit à un double degré de juridiction, celui de contester une décision de justice et à « faire examiner par une juridiction supérieure la déclaration de culpabilité ou la condamnation » (Pr. n° 7, CEDH, art. 2, §2.), corollaire direct du droit au procès équitable (CEDH, art. 6, §1.).
L’appel criminel in favorem, qui permet à « toute personne condamnée […] de faire examiner sa condamnation par une autre juridiction » (CPP, art. pr., III., al. 7), n’a pourtant été introduit dans l’ordre interne que par une loi du 15 juin 2000 (n° 2000-516), puis a été généralisé à toutes les décisions de fond par une loi du 4 mars 2002 (n° 2002-307, art. 8 / CPP, art. 380-2). Il en résulte que la cour d’appel, saisie seulement du mis en cause, doit réexaminer l’affaire dans son entier. Égalité des armes oblige, le Parquet peut lui aussi interjeter appel en complément de l’appel principal : c’est l’appel incident (CPP, art. 380-10). La dernière évolution législative en matière d’appel criminel est apportée par la loi de programmation du 23 mars 2019 (n° 2019-222, art. 63), qui permet de seulement limiter son appel « à la décision sur la peine » (CPP, art. 380-2-1, A.).
En somme, la procédure pénale française permet d’interjeter appel soit en contestation de la culpabilité, et donc par extension la peine attachée, soit seulement des peines prononcées, mais reste silencieuse sur un éventuel appel « partiel » qui contesterait uniquement un seul chef d’accusation en cas de poursuites multiples.
L’arrêt se penche précisément sur cette question. En l’espèce, le 14 septembre 2022, deux accusés sont condamnés, des chefs de violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner ainsi que de violences aggravées à, respectivement, huit ans d’emprisonnement pour l’un et dix ans de réclusion criminelle pour l’autre, assortis d’une interdiction de détenir ou porter une arme soumise à autorisation. Ils interjettent appel, le « limitant […] au seul chef de violence commise en réunion avec arme ayant entraîné la mort sans intention de la donner, puis visant les peines prononcées à leur encontre » (§4.). Le ministère public forme un appel incident. Le 17 novembre 2022, le premier président de la cour d’appel déclare les appels irrecevables au motif que l’appel n’est limité qu’à un seul chef d’accusation. Les demandeurs se pourvoient en cassation en annulation de l’ordonnance d’irrecevabilité.
Dans la première branche de leur pourvoi, les demandeurs font grief à l’ordonnance de s’être fondée sur le fait que l’appel ne visait que les seules dispositions relatives à la culpabilité. Cependant, dès lors que l’appel tend aussi, expressément, « à contester la peine prononcée au regard de l’ensemble des chefs de déclaration de culpabilité [, ] l’appel interjeté […] défère à la cour d’assises d’appel l’ensemble des chefs d’accusation retenus en premier ressort [, ] quand bien même [celui-ci serait] cantonné à certains chefs de disposition sur la culpabilité » (§5., 1°/.). Il en résulte que le motif invoqué par le premier président de la cour d’appel est inopérant(CPP, art. 380-1).
Dans la seconde branche, les demandeurs ajoutent que l’ordonnance contestée méconnaît le droit à un procès équitable (CEDH, art. 6, §1.) et plus précisément le droit à un double degré de juridiction en matière pénale(Pr. n° 7, CEDH, art. 2, §2.). Il en résulte que l’ordonnance est inconventionnelle.
Après avoir rappelé que le droit à l’appel est intégré dans l’ordre interne(CPP, art. pr., III., al. 7), ainsi qu’au visa du droit au procès équitable susmentionné, la Chambre criminelle énonce un formalisme distinct entre l’appel formé par le ministère public et celui formé par l’accusé. S’agissant de l’appel formé par le Parquet, celui-ci ne peut se cantonner à une partie de la décision sur la culpabilité (§11. / CPP, art. 380-2-1., A.). S’agissant de l’appel principal formé par l’accusé, il est nécessairement limité aux condamnations dont il a fait l’objet, même implicitement (§12.). Il en est en conséquence de même pour l’appel incident du Parquet.
Précisant le formalisme de l’appel, la Chambre criminelle rappelle que les États bénéficient d’une marge nationale d’appréciation en matière de recevabilité des recours(CEDH, García Manibardo c. Espagne, 15 févr. 2000, n° 38695/97), à condition que ces limitations ne restreignent pas abusivement le droit d’accès à un tribunal et se fondent sur un but légitime et proportionné au but recherché (CEDH, Labergère c. France, 26 sept. 2006, n° 16846/02).
La Cour en déduit qu’une subordination de la recevabilité d’un appel à la contestation de l’entièreté des chefs de culpabilité constituerait une restriction disproportionnée au droit d’accès à un tribunal. Dès lors, « lorsque l’accusé limite son appel à l’un des chefs d’accusation […], cet appel, qui tend aussi à contester la peine prononcée, saisit la cour de l’ensemble des chefs dont il a été déclaré coupable »(§15.). D’où il suit que l’ordonnance est irrégulière en ce qu’elle méconnaît le droit à un double de degré de juridiction. L’ordonnance est cassée et la cassation a lieu sans renvoi, la Cour étant en mesure d’appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige(COJ, article L411-3).
L’arrêt clarifie la question des conditions d’exercice du droit au recours d’une personne condamnée en première instance et poursuivie de plusieurs chefs d’accusation. L’on savait déjà que le mis en cause pouvait interjeter appel en contestation de la culpabilité ou bien seulement des peines prononcées. L’on savait aussi que le Parquet ne pouvait limiter son appel, principal ou incident, « à une partie de la décision sur la culpabilité » (§11. / Crim.,19 sept. 2018, n° 15-84.897, Crim., 27 janv. 2016, n° 15-87.393), puisque l’action publique ne peut se concevoir qu’en pleine contestation d’une condamnation ou d’un acquittement. L’on sait maintenant que l’appel limité à seulement certains chefs d’accusation reste recevable puisqu’il porte, implicitement, sur l’ensemble des condamnations. Pas d’intérêt, pas d’action. C’est aussi la raison pour laquelle, en l’espèce, l’appel incident de Parquet ne peut contester un quelconque acquittement.
Au regard du droit européen, lequel admet que les conditions de recevabilité d’un recours appellent, par leur « nature même, une réglementation par l’État, lequel jouit à cet égard d’une certaine marge d’appréciation »(§13.), cette décision de la Chambre criminelle permet d’en délimiter le cadre juridique : il n’appartient pas au premier président de la cour d’appel d’apprécier si la contestation porte sur un ou plusieurs chefs de culpabilité. Cet ensemble de limitations demeure toutefois implicite. Mais c’est précisément cette implicité, cette admission contenue du droit au recours, qui lui donne sa valeur. Le caractère implicite de la limitation de l’appel à l’ensemble des condamnations exprime justement qu’il procède de son essence et s’exonère ainsi d’explicitation. Il relève de la nature-même de l’appel criminel, « voie de réformation et non de rétractation »(Frédéric Debove, François Falleti et Iris Pons, Précis de Droit pénal et de procédure pénale, 8e édition, Paris, Presses universitaires de France, p. 1006.), qu’il est une contestation ; et qu’elle ne saurait exister, sauf à être pleine et entière.
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