14/05/2025
Dans le cadre de la Chaire d’excellence “Mémoire et avenir de la Paix, droit histoire et neurosciences”, l’Institut international des droits de l’Homme et de la paix, avec le soutien de la Région Normandie et de l’Uni
L’Institut international des droits de l’Homme et de la paix et l’Université de Caen Normandie s’associent pour une série de « Points de vue » exclusifs.
par Agathe WYZGOLIK
Etudiante en Master Droit des libertés de l’UFR Droit
de l’Université de Caen Normandie
Affaire : Cons. const., décision 2022-1021 QPC du 28 octobre 2022, Marie P*
La protection des sources des journalistes a été consacrée pour la première fois par une loi de 2010 qui a inscrit cette protection à l’article 2 de la loi de 1881 sur la presse. L’article 2 alinéa 3 de cette loi n’autorise une atteinte à ce secret qu’à de strictes conditions et il précise d’ailleurs que « cette atteinte ne peut en aucun cas consister en une obligation pour le journaliste de révéler ses sources. ». Plus spécialement, les articles 60-1 et 100-5 du CPP interdisent de verser au dossier d’enquête ou d’instruction des éléments obtenus par le biais de réquisitions ou d’interceptions de correspondances obtenus en violation du secret des sources, et ceci à peine de nullité.
Durant l’instruction, l’article 170 du CPP prévoit qu’il est possible de demander à la chambre de l’instruction l’annulation d’un acte ou d’une pièce de procédure irrégulière. L’article 173 poursuit en disposant que cette juridiction ne peut être saisie que par le juge d’instruction, le procureur, le mis en examen, la partie civile ou le témoin assisté. Un journaliste tiers à la procédure ne peut donc pas agir pour demander l’annulation d’une pièce portant atteinte aux sources journalistiques. Cette exclusion des tiers est justifiée par la protection d’un autre secret : le secret de l’enquête et de l’instruction, qui tend à préserver la présomption d’innocence et la bonne administration de la justice, et qui est consacré par l’article 11 du CPP.
Ces deux secrets sont extrêmement difficiles à allier et c’est de cette conciliation que le Conseil constitutionnel a été saisie par la voie d’une question prioritaire de constitutionnalité.
Madame Marie P., journaliste, conteste la présence dans un dossier d’instruction de documents couverts par le secret des sources journalistiques et souhaite en demander l’annulation. Cependant, elle va se heurter à un problème de recevabilité en ce qu’elle n’est pas partie à la procédure pénale dont l’acte découle. La requérante soulève une question prioritaire de constitutionnalité jugée sérieuse par la Cour de cassation et renvoyée au Conseil constitutionnel.
La requérante allègue une violation du droit à un recours effectif, du droit au respect de la vie privée et de la liberté d’expression en ce que les dispositions contestées ne permettent pas à un journaliste, qui n’est pas partie à la procédure, de présenter une requête en nullité d’un acte d’investigation ayant été accompli en violation du secret de ses sources. De plus aucune autre voie de droit n’est ouverte pour permettre la contestation de cet acte litigieux. Selon la requérante, cela instaurerait une rupture d’égalité entre le journaliste partie à la procédure ou témoin assisté et celui qui ne l’est pas.
Le Conseil constitutionnel rappelle en premier lieu la jurisprudence constante de la Cour de cassation selon laquelle un tiers à la procédure, y compris un journaliste, ne peut pas demander l’annulation d’un acte qui aurait été accompli en violation du secret des sources. La limitation des personnes pouvant contester la régularité d’un acte d’investigation se justifie par la protection du secret de l’enquête et de l’instruction et poursuit des objectifs de valeur constitutionnelle que sont la prévention des atteintes à l’ordre public, la recherche des auteurs d’infractions, le droit au respect de la vie privée ainsi que la présomption d’innocence.
En ce qui concerne le droit à un recours juridictionnel effectif, le Conseil constitutionnel atteste de l’ouverture d’autres voies de droit que celles offertes par les articles 170 et 173 du code de procédure pénale pour permettre à la requérante de déclencher une action contre les actes pris en violation du secret des sources des journalistes. La requérante a d’une part la possibilité, si la violation du secret des sources est constitutive d’une infraction, d’engager l’action publique à raison de cette violation et d’autre part, à défaut, celle d’engager la responsabilité de l’État.
Les Neuf Sages jugent dès lors que le législateur n’a pas méconnu le droit à un recours juridictionnel effectif pas plus que les autres droits invoqués par la requérante, ainsi les dispositions attaquées sont déclarées conformes à la Constitution.
Par cette décision, le Conseil constitutionnel a tranché en faveur de la protection du secret de l’enquête et de l’instruction, aux dépens de la protection du secret des sources des journalistes. Il rappelle ainsi la primauté du secret de l’enquête et de l’instruction, qu’il justifie par la préservation d’objectifs à valeur constitutionnelle.
Concernant la question de la recevabilité pour demander la nullité d’un acte d’investigation, il convient de dire qu’elle a fait l’objet de revirements à répétition, la jurisprudence semble néanmoins s’être stabilisée à l’occasion de deux arrêts du 7 septembre 2021 dans lesquels la Cour de cassation semble faire primer l’intérêt à agir. Cependant, même si l’intérêt à agir semble primer, ce n’est pas la seule condition pour que la requête soit recevable, il faut également avoir qualité à agir, qualité qu’un tiers à la procédure ne possède pas, ce qui était tout le problème en l’espèce. En effet, la journaliste est totalement étrangère à la procédure, elle n’a pas qualité à agir ce qui explique pourquoi son recours en nullité sur le fondement de la procédure prévue à l’article 170 ne peut pas être recevable.
Cela étant, la décision n’est pas exempte de critique. Le Conseil constitutionnel estime que la journaliste dispose d’autres voies de droit. Or, la constitution de partie civile devant le juge pénal se solderait par l’obtention de dommages et intérêts, mais ne permettrait pas d’annuler les actes d’investigation pris en violation du secret de ses sources. En outre l’article 6-1 du code de procédure pénale est un obstacle à une telle action car la violation du secret des sources doit avoir été préalablement constatée par une décision définitive. On peut donc se poser la question de l’effectivité de cette voie de droit et il en va de même pour l’action en responsabilité contre l’État à propos de laquelle le Conseil constitutionnel ne donne pas plus d’informations.
Se pose désormais la question de la conventionnalité de la situation. La requérante ayant mentionné son souhait de porter l’affaire devant la Cour européenne des droits de l’homme, il convient de se demander si cette dernière choisira également de faire primer le secret de l’enquête et de l’instruction sur celui du secret des sources des journalistes, solution qui, au vu de la jurisprudence de la Cour concernant la liberté d’expression semble a priori peu envisageable. En effet depuis l’arrêt Handyside de 1976, la Cour est très protectrice en la matière, estimant que « la protection des sources journalistiques est l’une des pierres angulaires de la liberté de la presse ». Néanmoins, la Cour européenne protège aussi le secret de l’enquête et de l’instruction, consacré par l’arrêt Bédat contre Suisse du 29 mars 2016. Elle considère que le secret de l’enquête et de l’instruction permet de protéger des intérêts qui découlent des articles 6 et 8 de la Convention en ce que le secret de l’enquête et de l’instruction permet d’une part de garantir l’impartialité des juges et donc de veiller à la bonne administration de la justice et d’autre part, permet de garantir le respect de la présomption d’innocence et la vie privée des personnes concernées par une procédure pénale.
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